LODIBERT Jean-Antoine-Bonaventure (1772-1840)

Lodibert est né à Crest (Drôme) le 14 juillet 1772, fils de Jean Antoine Lolibert (Maître d'Hôtel de monsieur le Duc de Caderousse) et de Ursule Jeanne Claude Sibourg (mariés le 25 février 1772 à Crest).

Il fait ses études et son apprentissage de la pharmacie à Lyon puis il vient à Paris dans les officines de Seguin puis du célèbre Bouillon-Lagrange.

Jean Lodibert est un homme d'1,66 m au front découvert, yeux bruns, porteur d'une cicatrice entre la tempe et l'oeil gauche. Son visage est ovale et ses cheveux bruns.

Il est préparateur de Bouillon-Lagrange pour ses cours de chimie, c'est là qu'il est remarqué par Parmentier alors pharmacien inspecteur qui le convainc de s'engager dans la carrière de pharmacien militaire.

A 20 ans, le 2 novembre 1792, il rejoint l'Armée du Nord comme élève pharmacien jusqu'au 13 juin 1793, sous-aide-major durant une année puis pharmacien de 1ère classe durant 18 ans. Il passe toute cette période de sa carrière à l'Armée du nord qui prend les appellations Armée du Nord et de Sambre-et-Meuse puis Armée de Batavie puis Armée de Hollande.

Il dirige le service pharmaceutique de différents hôpitaux militaires : Leyde, Berg-op-Zoom, Bréda et Middelbourg.

Il est en garnison á Leyde (Pays-Bas), lorsque tombant éperdument amoureux, il enlève une jeune Hollandaise de la meilleure société locale, Mlle Suzanne Maria Rietveld, qui n'est rien moins que la fille du recteur et professeur de théologie de l'Université de Leyde. II se marie avec elle le 20 avril 1800 à Antwerpen Belgique... Ils auront deux enfants : Suzanne en 1805 et Auguste en 1807.

En 1801, il passe sa thèse de docteur en médecine à Leyde avec le sujet suivant : De hygiena cum mia connubio (Du mariage de l'hygiène avec la chimie). Il signale le premier les inconvénients du chlore dans la purification de l'air dans des salles habitées et propose de remplacer le gaz par de l'eau imprégnée de ce gaz. Il est ainsi le premier à proposer la désinfection des eaux par le chlore.

Lodibert est atteint en 1708 des "fièvres intermittentes endémiques " (paludisme) au camp de l'ile de Walcheren entre les deux embouchures de l'Escaut. Après trois mois de convalescence il guérit et il est affecté à l'hôpital de Wesel (Allemagne).

Le 17 juin 1808 il devient docteur en médecine de l'Ecole de médecine de Paris il traite de la "Thymiatechnie médicale" proche de l'emploi médical des fumigations notamment celles pour "sanifier l'air"en luttant contre les miasmes.

Grâce à ses deux thèses de médecine sa notoriété scientifique est établie, il est chargé par le ministre de la Guerre en compagnie notamment de Desgenettes d'analyser les eaux de la Zélande province des Pays-Bas située entre les bouches de l'Escaut et du Rhin.

Affecté ensuite à l'hôpital d'Utrech puis à celui de Strasbourg où il n'y reste que quelques mois.

Il devient pharmacien en chef de la Grande Armée et participe à la campagne de Russie. Il sera l'un des rares pharmaciens à en revenir. Parmi les dix pharmaciens en chef et principaux attachés à la Grande Armée, deux seulement retrouvèrent la France vivants : Laubert et lui.

Il existe une estime mutuelle qui lie les deux hommes liés hiérarchiquement. Laubert alors pharmacien chef cite les travaux que fait Lolibert jeune et passionné.

Il est nommé Pharmacien Principal au 9ème corps de la Grande Armée le 5 septembre 1812. Sa candidature est retenue avant celle de Groslambert et de Peyre car c'est le plus ancien dans le grade de première classe "Le sieur Lolibert a 16 ans de service dans le grade de première classe, il a toujours été employé aux armées. il jouit de la réputation la plus honorable sous tous les rapport" (rapport présenté au ministre le 3 septembre 1812).

Lettre de Laubert à Lolibert (thèse de Sylvie Oulieux retrouvée dans le dossier Lolibert AVG 1054)

Lettre du Chevalier Laubert Pharmacien en Chef de la Grande Armée à Monsieur le Pharmacien Lodibert à faite à Dantzig* le 27 décembre 1812.

Vous devez mon cher camarade, vous rendre à Marienwerder ** où se rassemble le 9ème corps auquel vous êtes attaché. Réunissez les pharmaciens qui appartiennent à ce corps et donnez leur l'ordre de suivre la même destination.

En l'absence de M. Coquilletten***, pharmacien principal du 4ème corps placé à Marienwerder, vous remplirez ses fonctions. Vous exercez sur les établissement placés dans l'arrondissement de ces deux corps, la surveillance nécessaire à l'ordre de ces services et me communiquerez les observations que vous ferez à cet égard. A mesure que les pharmaciens qui y sont attachés y arriveront, vous m'en instruirez.

J'ai désigné M. Germain pharmacien aide-major pour être attaché au 9ème corps .

J'ai l'honneur de vous saluer avec ma parfaite considération. Laubert

* Dantzig se situe au nord de la Pologne et à pris le nom de Gdansk

** Marienwerder se situe en Allemagne près de Berlin.

*** Louis-Auguste Coquillette devenu pharmacien en chef du 4ème corps d'armée, il est fait prisonnier lors de la campagne de Russie selon l'état du 15 février 1813 et n'a pas réparu, il serait mort de froid pendant la Retraite ce qui explique que Lolibert est chargé de le remplacer.

A Mayence, Jean Lodibert est nommé pharmacien en chef de la Grande Armée le 14 janvier 1814 et il participe aux campagnes de Saxe et de France.

En 1815, à la chute de l'Empire, il réorganise le service de la pharmacie militaire et son grade de pharmacien en chef d'armée lui est conservé durant la Restauration.

Il est premier professeur à l'hôpital militaire de Lille durant deux années puis à l'hôpital du Val-de-Grâce où il enseigne 9 ans.

Il est membre de la Société de pharmacie de Paris (qui deviendra l'académie de pharmacie) à partir de 1818 et il en devient président en 1832

En 1825, il découvre la caryophylline dans les fleurs d' Eugénia caryophyllata plante de la famille des myrtacées. Cette découverte est simultanée à celle de Charles Baguet (1772-1854) lui aussi pharmacien militaire qui servit dans l'Armée du Rhin et fut fait prisonnier (cf bibliographie).

Il est ensuite nommé pharmacien en chef à l'hôpital du Gros-Caillou à Paris durant 10 ans jusqu'en 1835. Il est fait membre de l'Académie royale de médecine 1825 et officier dans l'ordre de la Légion d'Honneur par le roi le 29 mai 1829.

Il est admis à la retraite par suppression d'emploi le 27 septembre 1835 après 43 ans de service et 18 campagnes. Ceci fait de Lolibert un pharmacien militaire particulièrement motivé dans son implication pour les armées et fort injustement oublié comme le souligne Jacque Noroy dans son article qui lui a consacré.

Il décède cinq ans plus tard le 23 janvier 1840 à son domicile parisien du 84 rue de Sèvres d'une "sorte de consomption" à l'âge de 68 ans.

Jacob en fait l'éloge lors de ses obsèques, le 26 janvier 1840 au nom de la pharmacie militaire "ceux qui l'on connu savent combien il était bon, sensible, aimant, empressé à aider ses subordonnés des conseils de son expérience ou à les appuyer de son crédit. La justesse de son esprit, la maturité de sa raison, la variété de ses connaissances, lui donnaient de grands avantages dans les discussions scientifiques, où il s'engageait volontier, soit avec des amis, soit au sein des Académies dont il était membre. M Lodibert possédait l'élégance des manières, une aménité de caractère, une noblesse des procédés, une sûreté de commerce, qui exerçaient une sorte de séduction et commandaient l'affection".

Pariset dira de lui à l'Académie de médecine : "A son heureuse mémoire, à la plus exquise politesse, à l'aménité la plus attachante, à une bonté de coeur inaltérable, Lolibert joignait les qualités les plus solides et les plus dignes de respect : une fidélité inviolable pour ses amis, une droiture inflexible".


Bibliographie :

Nauroy Jacques.Un pharmacien militaire injustement oublié : Lodibert (1772-1840). Revue d'histoire de la pharmacie. 1975, 63, (224), 311-9. lodibert un pharmacien oublié.pdf

Oulieu Sylvie. Contribution à l’histoire de la pharmacie : les pharmaciens de la Grande Armée. Thèse d’état de docteur en pharmacie. 5 décembre 1986. Lyon I.

Guitard Eugène et Humbert. Baguet et Lodibert inventeurs de la caryophylline : Rafaël Roldan y Guerrero, in Farmacognosia, 1951. Revue d'histoire de la pharmacie. 1953, 41, (136), 20.

CTHS - LODIBERT Jean Antoine Bonaventure

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