LES APOTHICAIRES ET PHARMACIENS DE LA MARINE


Les premières expéditions maritimes lointaines comme celle de Jacques Cartier qui débarque au Canada en 1535 emmènent un apothicaire à leur bord.

Au début du XVIII siècle, les disciplines de chirurgien et d’apothicaire sont souvent exercées par la même personne à bord des navires. Par manque de vocation, surtout pendant les épidémies, il faut avoir recours dans la Marine pour les chirurgiens et les apothicaires à « la levée » variante de la mobilisation.

Les maladies font plus de perte que les combats eux-mêmes ce qui explique le peu d’empressement d’aller servir dans la Royale. Les matelots déjà dénutris, en convalescence ou malades retournent à la mer ce qui accroît la mortalité.

A un noyau de praticiens « entretenus » s’agglomère une foule de chirurgiens et d’apothicaires peu considérés. Les apothicaires étaient chargés d’assurer l’approvisionnement en substances et préparations médicamenteuses destinées à soigner les affections « du bord » : la dysenterie, le typhus, les fièvres, la syphilis et le scorbut. Ils contribuaient à l’amélioration de l’alimentation, à la conservation des aliments et participaient à la « désinsectisation, dératisation ».

A terre, les hôpitaux maritimes de Toulon et Rochefort dont les deux premiers datent de 1674 (Brest 1684) sont prévus pour accueillir 200 puis 400 malades sous la dépendance de l’intendance, des apothicaires y sont présents.

Le règlement royal du 10 juin 1683, signé par Louis XIV, instaure un service des apothicaire dans les hôpitaux de la Marine (Rochefort, Toulon, Brest) afin d'assurer les préparation pharmaceutiques. Des jardins botaniques sont aménagés au sein de ces hôpitaux qui servent à la fois à la production locale et à l'accueil des plantes exotiques apportées par les pharmaciens de la Marine naviguant.

L’ordonnance de 1689 renforce le rôle et les fonctions des médecins, chirurgiens et apothicaires. La législation des coffres de mer est mise en place pour réglementer leur utilisation. Il y a obligation de visite par l'apothicaire ou le chirurgien major avant et à l'arrivée avec certificat descriptif. Il y a aussi obligation de tenir un registre sur le nom des malades à bord, le type de maladie, les remèdes employés. Le coffre contenait des drogues et des instruments de chirurgie.

Pour la marine royale, le règlement de Choiseul de 1765 décide une augmentation sensible des officiers de santé : pour un vaisseau de 100 canons et 1800 hommes à côté d’un chirurgien major, d’un second chirurgien et de quatre aides est prévu un apothicaire.
Le corps des apothicaires de la Marine est créé en 1767. L’hôpital de Rochefort en 1789 comprendra 12 apothicaires, 12 chirurgiens, 12 sœurs et 21 galériens-infirmiers...

A la fin de l’Ancpharmarineien régime, le service de Santé de la Marine comprend notamment à côté de 114 chirurgiens, 85 apothicaires à la mer qui bénéficient d’une retraite et d’une pension en cas de décès. Lors des expéditions à travers le monde, les pharmaciens sont souvent les scientifiques du bord car ils collectent et font l’inventaire de la flore, de la faune et des minéraux que les nouveaux territoires pouvaient fournir. Les végétaux exotiques prélevés, amenés par bateau dans des serres de fortune, sont cultivés dans les jardins botaniques des hôpitaux de la Marine créés et surveillés par les pharmaciens qui produisent également des plantes médicinales.

Au XIX siècle la chimie et l’analyse se développent et les pharmaciens de la Marine deviennent des experts chimistes auprès du commissariat et des constructions navales. Ils analysent les produits les plus divers : alimentation, cuir, textiles, huiles, peintures, combustibles divers, lubrifiants et gaz toxiques. En 1919, leur engagement est conditionné par la possession de trois certificats des sciences dont deux de chimie et ils deviennent pharmaciens chimistes de la Marine.

Cette relative autonomie se terminera par le 9 juillet 1965 par la création d’un corps unique de pharmacien chimiste des armées associant les praticiens des armées de terre de l'air et de la marine. le terme de chimiste provenant des compétences des pharmaciens de la Marine dans ce domaine.

Deux pharmaciens de Marine sont l’archétype de tous ceux, souvent botanistes, qui partirent vers des terres lointaine et en revinrent avec des plantes, graines, croquis, animaux, observations des plus diverses qui enrichirent le patrimoine scientifique mondial.

Charles Gaudichaud-Beaupré (1789-1854).
Pharmacien de la marine et botaniste, il fait partie de l’état major scientifique de la corvette Uranie qui quitte Toulon en 1817 pour un tour du monde.
Il rentre au Havre en 1820 et rapporte, malgré le naufrage du bateau, 3000 espèces de plantes dont 500 manquaient au Muséum et 200 étaient inconnues. Il remplace à l’Académie des sciences son maître, Laurent de Jussieu.

René-Primevère Lesson (1794-1849). imagelesson
Il est emmené par le commandant Duperrey en compagnie de Dumont d’Urville sur la Coquille (1822-1825) pour faire un tour du monde scientifique en sens inverse de l’Uranie.
Avec Dumont d’Urville il rapporte près de 30000 espèces botaniques dont 400 nouvelles, 110 espèces d’insectes, 300 poissons etc. Cuvier rend hommage à cette expédition de trois années particulièrement riche en découvertes.

Références

Pluchon P. Histoire des médecins et pharmaciens de la marine et des colonies. Edition Privat. 1985.

Acker P. De l’apothicaire du roy au pharmacien chimiste des armées. Ora edition. 1985.

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