Fédération Internationale de Pharmacie (FIP)
Section de Pharmacie Militaire et d’Urgence (MEPS)
CONGRES DE SYDNEY 2003
Pharmacien Colonel R. VAN DAMME
L'histoire de la pharmacie militaire - un aperçu

Introduction

Avant d'explorer davantage le sujet réel de cet exposé, qui est l'histoire de la pharmacie militaire, je voudrais d'abord vous vous donner quelques dates concernant l'histoire de la pharmacie en général.

En Europe Occidentale la pharmacie était principalement celle des monastères, toujours pourvue d'un jardin des simples, souvent de grande taille. De ces périodes nous sont parvenues bien des fresques et des peintures, souvent d'une naïveté et d'un charme émouvant, connues sous le thème "Le Christ comme Apothicaire"
La première université européenne où la pharmacie a été enseignée comme une science fut celle de Montpellier. Mais le tout premier règlement a été établi sous le règne de l’Empereur Frédéric von Hohenstaufen
En 1231 il a édité les dits « Constitutiones” qui divisaient la médecine en trois branches

Des ententes ou la dichotomie entre les trois branches étaient défendues, et le saint empire romain germanique a prévu des inspecteurs distincts pour les trois piliers.
Le nombre et l’emplacement des pharmacies ont été réglementés également. A partir de ce moment-là, la pharmacie devint une profession.
Au 13ième Siècle les pharmaciens étaient appelés apothecaries ou apothicarius, en français apothicaire ou apoticare. Ils bénéficiaient d’un statut social élevé, juste un peu en dessous de celui des médecins. Au 15ième siècle le mot néerlandais et allemand “apotheker” ou apteeker est apparu. Seulement au 19ième siècle le mot pharmacien remplacera apothicaire en français.
La façon habituelle de s’adresser à un pharmacien fut le titre de Master, Maître ou Magister (ce qui est d’ailleurs toujours leur titre en Autriche, aux Forces Armées également)

Au 17ième siècle, la séparation stricte entre médecine et pharmacie a été établie une fois de plus – moyennant des ordonnances et des lois, et la plus grande partie de la législation a vu le jour.

Concernant la pharmacie militaire, nous nous limitons à l’Espagne, la France, les pays Germaniques, les Pays-Bas et la Belgique.

 

Espagne

Nous sommes en 1476 : d’après une initiative de la Reine Isabelle de Castille (Isabelle de Castilla), le premier hôpital de campagne dans l’histoire a été créé. La liste des membres de personnel cite le nom d’un certain Maestre Jaime Pascual, le premier pharmacien militaire du monde. Il avait deux assistants et quatre valets. La reine Isabelle s’est probablement inspirée de l’organisation pharmaceutique et de la médecine dans le monde arabe, et plus précisément du Califat splendide de Grenade (Granada), qui, à cette époque-là partageait la presqu’île avec la Castille et Aragon.

Car en effet, c’étaient bien les Perses et les Arabes qui ont fondé la pharmacie scientifique et l'indépendance de la profession par rapport au monde médical. Ils étaient d’avis qu’il y avait incompatibilité entre pharmacie et médecine et qu’un contrôle mutuel est au profit du patient et de sa sécurité. Des écoles ont été créées et la première vraie pharmacie du monde fut installée à Bagdad en 770 A.D.


Retournons en Espagne. Sous Charles I (Carlos) des documents mentionnent médecins, chirurgiens et pharmaciens ou “farmaceùticos”, bien que la dénomination la plus commune fut “bóticos”
En 1567, durant le règne de Philippe II (Felipe) nous notons l’invention du concept de l’hôpital militaire, une installation fixe et permanente désigné pour traiter des militaires et souvent également les membres de leurs familles. Le premier vrai hôpital militaire du monde d’ailleurs a été celui de Malines (Mechelen) maintenant en Belgique flamande, mais territoire espagnol à l’époque. Il faut cependant faire mention du fait que l’empire byzantin connaissait un genre d’hospices militaires.

Les Espagnols de l’époque ont édité nombre de documents et de règlements comme entre autres "Ordenanzas para el régimen y gobierno de la Real Botica" contenant les réglementations les plus vieilles connues pour la pharmacie militaire. Certains traités parlent même de la pharmacie tropicale. En 1647, sous Philippe (Felipe) IV, le Real Botica de la Farmacia Real a été créé – un type de pharmacie mobile pour les campagnes.
Le nombre d’hôpitaux militaires s’est accru également. Peu après, en 1669, une trousse de pharmacie de campagne tropicale a été réalisée.
Vers la fin du siècle les premiers laboratoires pharmaceutiques ont été organisés. Dans ces dits Laboratorios Yatro-Quimicos la galénique et la chimie pharmaceutique furent étudiées. C’est autour cette période-là également que la production militaire de médicaments a débuté.
En 1720 le premier Boticario Mayor de los Reales Ejercitos a été mis en fonction, c'est-à-dire l’inspecteur pharmaceutique militaire des hôpitaux de campagne.
Mentionnons encore que la plus grande partie des pharmacies des hôpitaux militaires montrait un aspect extrêmement luxueux.

Au Musée de la Pharmacie Militaire l’officine de l’Hospital Real de Ceuta a été reconstituée.
Vers la fin du 18e siècle la pharmacie militaire devint un degré universitaire. Le statut spécial a été encore affirmé par un uniforme particulier depuis 1796.

Nous n’allons pas nous étendre sur la vaste organisation du Corps en cette époque, mais il est clair que la pharmacie militaire fut considérée comme très importante. En 1831 des directives et des réglementations élaborées ont vu le jour.

Mais, autour de 1850, durant le règne d’Isabelle (Isabella) II les services médicaux ont été réorganisés et le Corps pharmaceutique a abandonné bien des privilèges aux médecins. Un procès légal a été entamé et perdu par les pharmaciens, avec comme résultat que la pharmacie militaire a été expulsée de l’Université. Cependant cela n’a pas empêché l’accroissement d’un vaste réseau en outremer et le développement d’une pharmacie hippomobile

Et encore un peu plus tard pas moins de trois inspecteurs ont été nommés. Durant le règne éphémère du roi Amédée (Amadeo) et sous la 1re République (1868-1874) un général inspecteur pharmaceutique a été nommé et la Pharmacie Militaire Centrale obtenait le droit de délivrer des médicaments aux familles des militaires et à de nombreuses organisations et institutions publiques.

Sous Alphonse (Alfonso) XIII, en 1927, plusieurs commandements pharmaceutiques très élargis ont été créés. Mais, la 2e République (1931-1936) a aboli à nouveau le titre d’Inspecteur, mais a maintenu les Chefs Pharmaceutiques des Forces Militaires. Cela nous mènerait trop loin de nous étendre sur toutes les structures pharmaceutiques dans les camps monarchistes et républicains pendant la Guerre Civile. Mais puisque la fraction nationaliste du Général Franco a obtenu la victoire, leur système a été maintenu, ce qui comprend un renforcement du Corps Pharmaceutique, et la création d’une Académie de Pharmacie Militaire.
L’histoire du service pharmaceutique de l’Armada (la Marine espagnole) est plus récente et débuta en 1895. Auparavant des pharmaciens de l’armée de terre furent parfois af
Farmacia Central Madridfectés à l’Armada pour des périodes limitées, plus précisément dans le cadre de la préparation d’expéditions, et la production et la composition de trousses ou "caxas de medicinas".

Il mérite d’être mentionné également que les pharmaciens de la marine furent très actifs à bord ainsi que dans les territoires colonisés ou visités, dans les domaines du contrôle des denrées alimentaires et des substances exotiques des colonies.
Les corps médicaux de l’Armada ont été joints durant la 2e République en 1931, et le nombre des pharmaciens de la marine a été réduit à 4 et même anéanti un peu plus tard, et ce jusqu’à leur recréation en 1943 sous le Caudillo Franco. .

Quant à la Force Aérienne on peut être bref, car le Corps n’a été créé qu’en 1939, immédiatement après la fin de la Guerre Civile. Ses personnels obtenaient leur propre Pharmacie Militaire Centrale à Burgos, la vieille capitale nationaliste durant la Guerre Civile. En 1947 une Académie et une Ecole succinctes ont été créées pour les pharmaciens de la Force Aérienne et pour leurs assistants. Jusqu’en 1990, au moment où tous les services médicaux ont été unifiés.

 

France

France, 1552. – Sous le règne d’Henry II de Navarre, les pharmaciens militaires français ont été cités pour la première fois dans un traité s’intitulant "L’état des dépenses à entreprendre" rédigé en vue de la préparation d’une campagne. Le texte parle de "l’apothycaire du Roy", ses stocks portables pour utilisation en campagne, et son salaire de 20 livres.

Le 17 janvier 1708 un édit royal a créé un Service Médical permanent avec ses corps d’officiers. Il énumère scrupuleusement les devoirs, les missions et les droits des médecins, des chirurgiens et des apothicaires. Mentionnons par exemple le fait que chaque pharmacien militaire hospitalier a l’obligation d’installer " un jardin de plantes médicinales afin que l'apothycaire puisse trouver les herbes récentes desquelles on a ordinairement affaire à des sucs et y eslever encore plusieurs plantes rares et estrangères et y choisir un endroit exposé au soleil ...pour tout ce que les médecins ordonnent..." –

En 1747 le premier formulaire imprimé a été rédigé par un chirurgien et par le pharmacien Geoffroy, intitulé "Formules de pharmacie pour les hôpitaux militaires du Roy".
A partir de ce moment jusqu’à nos jours, des pharmaciens militaires seront impliqués dans la rédaction détaillée de formulaires désignés spécialement pour les Forces Armées.

Le plus souvent, les pharmacies des hôpitaux militaires étaient très somptueuses, avec des collections brillantes de porcelaine de Chine ou de faïence, certaines de grande taille, appelées "La Montre de l'Apothicaire".
On doit admettre que jusqu’autour de 1790 les médecins furent le corps encadrant les chirurgiens et les pharmaciens. Les apothicaires collectaient et cultivaient des plantes médicinales, accompagnaient le médecin àlors de ses tournées de consultation, devaient être présents lors de l’administration aux patients pour éviter des gaspillages.

En 1761 Cadet de Gassicourt a été le premier à recevoir le titre de "Apothicaire-Major et Inspecteur des pharmacies des hôpitaux sédentaires", plus tard modifié en "apothicaire-major des hôpitaux militaires et des camps et armées". Un inspecteur célèbre a été Parmentier, nommé le 1 Germinal de l’An V ( 21 mars 1797).

En 1786 les pharmaciens obtenaient leur uniforme distinct.


En 1792, juste avant la déclaration de la guerre contre l’empire d'Autriche, l’égalité totale a été ordonnée entre les trois corps médicaux – médecine, chirurgie et pharmacie. Un Conseil Médical fut créé en l’an II comme instance suprême – sa composition comptait neuf membres – trois de chaque corps. La même année, la Pharmacie Centrale Militaire a été fondée. La dénomination de “pharmacien" a été officialisée, de même que les grades - pharmacien-chef (Général de Brigade), Pharmacien de 1re Classe (Chef de Brigade - Colonel), 2e Classe (Capitaine) et 3e Classe (Lieutenant).
En 1804 le Service de Santé de la Cour Impériale a été érigé, comme d’ailleurs une pharmacie impériale.

Le nombre de pharmaciens militaires a fluctué continuellement au cours des années. En l’an III, les Forces Armées disposaient de pas moins de 345 pharmaciens. Ce grand nombre était dû aux nombreuses missions et tâches, y compris l’assistance chirurgicale. En 1859 nous comptons 168 pharmaciens et entre autre un Brigadier Inspecteur, mais bien des civils travaillèrent également aux hôpitaux militaires et aux ambulances, plus précisément pendant la guerre contre la Prusse. Les pharmaciens jouaient également un rôle important dans la bromatologie et l’assurance qualité des denrées alimentaires.

L’indépendance du Corps Pharmaceutique a pris fin en 1882, année pendant laquelle il devint soumis au Corps Médical. Seulement après la Première Guerre Mondiale le Corps a pu restaurer son importance. Durant cette Guerre, des pharmaciens ont été actifs dans des hôpitaux, des dépôts, des pharmacies régionales, des laboratoires etc., et également dans des Équipes dites Z, contre les gaz de combat. Et plus précisément la recherche fructueuse dans ce domaine, surtout à l’école de Pharmacie, a restauré la dignité du Corps.
Pour vous donner une idée, au début de la première Guerre Mondiale l’armée française comptait 126 pharmaciens-chimistes du cadre actif, hormis 2.193 réservistes.

La Marine est une autre histoire. Déjà en 1535 des apothicaires ont pris part à des expéditions en outremer, au Canada par exemple. Un nom bien connu est celui de Jacques Cartier. Plus tard, au 17e Siècle, la présence de pharmaciens à bord de navires de la Marine fut une procédure standard. En 1631 la fonction d’"apothycaire de l'Amiral destiné à servir auprès dudit seigneur et Grand Maître de la navigation" est mentionnée
Un détail original : le salaire des pharmaciens navigants variait avec le nombre de canons à bord du bâtiment sur lequel ils servaient.

Pour la clarté, les pharmaciens de la Marine étaient complètement soumis aux médecins à cette époque. Mais à partir de 1766 jusqu’à la Révolution, leur importance n’a cessé de croître proportionnellement avec le nombre des multiples découvertes de substances tropicales et médicinales exotiques. Et oui, en 1793 le premier Inspecteur Pharmaceutique de la Marine a été nommé. Et depuis 1798, la Marine également adoptait la dénomination plus scientifique de “pharmacien”.

Un uniforme vert particulier a été désigné, en opposition aux uniformes noirs des médecins et rouges des chirurgiens. Les pharmaciens les plus importants ont obtenu un grand pouvoir dans le "Conseil de Salubrité" et le "Conseil de Santé". Finalement, en 1910, le Premier Pharmacien-Chimiste Général de la Marine a été nommé en même temps qu’un Général du Corps des Pharmaciens Coloniaux.

Spécialement durant le 19e siècle, les tâches classiques des pharmaciens, servant à la Marine ou aux colonies, étaient très vastes et nombreuses, elles ont compris :

La conséquence de cette abondance de tâches et de devoirs explique le nombre élevé de pharmaciens-chimistes qui accompagnaient les campagnes coloniales.

Le Corps est fier quand il parcourt la liste des noms réputés. Nous énumérons quelques-uns d’entre eux :
Hébert: autour de 1600 le premier colon français au Canada, d’où la présence de sa statue à Québec.
Cadet de Vaux: bromatologie et fondateur de la première école française de boulangerie (!)
Baron Parmentier: créateur de la chimie alimentaire– il a promu la pomme de terre comme un aliment hebdomadaire, ce qui s’est montré très important dans les périodes de famine dues aux récoltes de blés perdues.
Caventou a isolé la quinine et la strychnine
Liotard est devenu gouverneur dans bien des colonies français et finalement de toute l’Afrique Occidentale Française au début du 19e siècle.

Maintenant, depuis 1968, la France a un Service de Santé unifié.

 

Les territoires allemands

La première citation de pharmaciens de campagne et de leur pharmacie mobile, la “Apothekerswagen” peut être située en Suisse.
En 1595 l’Empereur allemand a prescrit l’équipement, et entre autres un chariot avec le dit “"Apodeckerei", comprenant un compartiment pharmaceutique, et des sièges pour le docteur, le chirurgien (barbier) et le pharmacien
Le premier document germanique qui a défini la médecine militaire a été édité en par le Kurfürst bavarois Maximilien I. Il mentionne les droits et les devoirs des officiers du 18ième siècle dans divers États germaniques, et cela surtout inspiré par l’exemple français.
Les pharmacies mobiles étaient assez communes en Prusse et en Bavière, et souvent un pharmacien était présent à l’État Royal. L’armée prussienne, en 1787, comptait 46 pharmaciens, souvent impliqués dans la production de médicaments également . Au début du 19e Siècle, et pratiquement dans tous les états allemands (Bavière, Prusse, Autriche-Hongrie) des Services de Santé militaires indépendants ont été créés. En 1809 l’État Médical a été créé, avec comme membres le Chef Médecin, un Inspecteur Principal des Hôpitaux de Campagne et un Pharmacien Principal de Campagne, un Oberfeldapotheker

A l’empire Habsbourg et en Bavière, nous notons également la création d’un Militärapothenswesens, des Institutions Pharmaceutiques Militaires, avec une pharmacie centrale, des réglementations, des règlements etc. Vers la fin du siècle, les pharmaciens ne furent pas encore incorporés dans le Corps de la Santé Impérial – cela s’est produit seulement en 1902

La Marine germanique disposait d’un service pharmaceutique interne, avec des dizaines de pharmaciens travaillant aux colonies.
Pas moins de 3639 pharmaciens ont participé à la 1re Guerre Mondiale comme employés militaires. Une affectation importante a été celle à la Hauptsanitätsdepot Antwerpen. Le dépôt sanitaire principal, installé dans les bâtiments antérieurement occupés par la Pharmacie Militaire Centrale belge .

Évidemment, le Corps pharmaceutique allemand a été impliqué également dans la préparation de l’eau potable, dans l’hygiène et la désinfection, et dans des analyses. En ce qui concerne les gaz de combat, vers la fin de la Guerre, d’autres spécialistes– appelés Gasschutzofficiere, ont remplacé dans la plus grande partie des cas, les pharmaciens
Dans les colonies du Togo, du Cameroun, et de l’Afrique du Sud-Ouest et Orientale, les pharmaciens ont dû se développer en maîtres de l’improvisation dans leur préparation de médicaments, car les liens avec l’empire étaient entièrement rompus (15)

 

Belgique

D’abord signalons que le Royaume n’existe que depuis 1830 et que – pendant les siècles précédents le pays fut occupé ou colonisé par l’Espagne, l’Autriche et la France. Entre 1815 et 1830 il a été un territoire du Royaume des Pays-Bas

Le premier hôpital militaire fixe dans l’histoire a été créé en 1567 par Marguerite de Parme et fut appelé "Hospital Real del Ejercito de los Países Bajos", Hôpital de l’Armée Royale des Pays-Bas. Il se trouvait à Mechelen (Malines), actuellement une ville de province dans la Belgique flamande. Il ne disposait pas d’une pharmacie et les médicaments étaient délivrés par des pharmaciens civils municipaux.

Seulement en 1673 une pharmacie hospitalière a été installée, avec comme chef de service le civil, Maître Norbertus Van Vooren. Mais c’est donc bien ici qu’a été fondé le Service Pharmaceutique Militaire de l’armée des Pays-Bas, où des pharmaciens ont été affectés à des hôpitaux de garnison.

En 1685 l’Archiduc Albert a édité les "Constitutions del Hospital Real del Exerçait de lors Paises Bajos".
Ces règlements sur le fonctionnement de l’hôpital comptaient 14 articles qui concernaient le Boticario y sus Obligations – le pharmacien et ses obligations. C’est frappant et typique que le pharmacien devait être présent lors l’administration des médicaments aux patients, afin de “veiller à ce que le patient avale bien les médicaments et à récupérer ce qui n’a pas été pris par celui-ci”

Dans une étude sur Malines, il y a mention d’une ordonnance par l’Impératrice Marie-Thérèse d’Autriche à la suite d’une plainte par les pharmaciens de la ville. Le document confirme le monopole sur la vente des médicaments, et comprend une indication particulière pour les monastères et pour les chirurgiens militaires des garnisons. “La nouvelle ordonnance sur la délivrance de médicaments par des cloîtres, par des militaire ou par d’autres, autorisée par Sa Majesté”, a été promulguée le 16 mars 1772
La Convention française a décidé d’affecter un nombre de pharmaciens dans chaque hôpital militaire, sans aucune qualification spéciale. Ils formaient un Corps technique, et, dans chaque armée la supervision était assurée par un pharmacien en chef. Depuis 1792 le corps pharmaceutique a gagné l’égalité avec les corps médical et chirurgical.

Durant le règne français il y avait beaucoup de pharmaciens militaires, qui jouaient également un rôle comme anesthésiste. Le premier pharmacien militaire belge ayant rejoint le Service Médical français en 1799 a été Joseph Allerweireldt de Bruges (Brugge). Jusqu’en 1803 il a travaillé aux hôpitaux militaires de Gand, d’Anvers, de Bergen-op-Zoom, de Gand à nouveau, de Bruxelles et de Bruges, où il a quitté le service afin de devenir médecin à Paris. Peu après il a ouvert un hôpital, mais en 1831 il rejoignait l’armée belge nouvelle née, et cela comme pharmacien de 2e classe à Bruxelles.

En 1814, après la bataille de Waterloo, lors la formation de la nouvelle armée des Pays-Bas, 48 officiers de santé belges ont rejoint cette armée, six d’entre eux étant des pharmaciens. Ils ont conservé leur grade qu’ils avaient obtenu dans les Forces Armées françaises. En 1815 une École Militaire de la Santé a été érigé à Leiden, dont le corps des professeurs comptait deux pharmaciens. La Guerre s’annonçait – Waterloo – et le nombre de pharmaciens belges – ou plutôt sud-néerlandais a diminué à 3.
Après la Bataille de Waterloo, des engagés sont recrutés car pratiquement seulement des sud-néerlandais travaillaient dans les hôpitaux sur le territoire qu’on appelle maintenant la Belgique. En 1817 nous comptons déjà 48 pharmaciens, mais un médecin, l’Inspecteur Général effectue les inspections. Mais des restructurations entamées par les Hollandais diminuent alors de façon considérable le nombre et le statut des officiers médicaux. Bon nombre de dégagements dit honorifiques se sont produit. A la veille de la révolution belge d’indépendance, seulement 4 pharmaciens restaient en service, trois d’entre eux à la colonie de l’Inde Néerlandaise – l’Indonésie actuelle.

A la création du Gouvernement Provisoire belge, un comité a été composé de 4 membres - un pharmacien, le premier Inspecteur Pharmaceutique Militaire belge van den Corput, qui quittera l’armé peu après afin de devenir professeur d’université. Son successeur Verzyl n’a pas tenu longtemps non plus, car il a été mis sur une voie de garage dans la province après une dispute avec le général médecin. Nous n’allons pas trop insister sur ce sujet, mais il vaut bien la peine de jeter un coup d’œil sur le troisième – car la biographie de Clementz peut bien être qualifiée de remarquable.

Ce personnage, né hollandais a commencé sa carrière comme assistant de pharmacie à l’armée de l’Empereur Louis-Napoleon, a participé à une campagne contre la Russie, a été fait prisonnier, a été libéré d’un camp à Leipzig et a rejoint la nouvelle armée néerlandaise. Il alors est impliqué à la Bataille de Waterloo.

A la création de la Belgique, il a décidé de rejoindre le nouveau royaume et il a changé de nationalité. Pour enfin finir sa carrière comme pharmacien en chef et inspecteur jusqu’à 1855.
Le Gouvernement Provisoire de la Belgique a reconnu 4 corps : les officiers de la santé (pharmaciens et médecins unis), les vétérinaires, les infirmiers et les administrateurs médicaux.
Pendant la Grande Guerre 1914-1918 bien de pharmaciens servaient dans divers hôpitaux d’urgence et de campagne et dans des compagnies d’ambulances.

Le 25 septembre 1914, lorsque la guerre éclate, la Pharmacie Militaire Centrale a dû quitter Anvers. Avec une partie de ses réserves et de son matériel elle s’est installée à Calais, en passant par Zeebrugge, partiellement en train, et en navire. Le navire “Ville de Liège” a été réquisitionné dans ce but. Des pharmaciens militaires ont été affectés à Paris et à Londres en guise de liaison afin d’obtenir des approvisionnements urgents.
A Calais, le personnel s’est accru assez vite et des ateliers satellites ont été fondés. En 1915, le Conseil Municipal de Calais a mis le laboratoire municipal à la disposition de deux pharmaciens militaires belges, qui y ont fondé un laboratoire de bactériologie, également au service des civils.
En 1918 le lieu d’activité principal est devenu Le Havre, avec par la suite un poste avancé à Bruges, afin d’organiser l’approvisionnement médical des hôpitaux militaires rouverts après la reconquête du territoire.

En 1919 la Pharmacie Centrale a été réinstallée à Anvers. Notons encore que le premier inspecteur des pharmacies militaires après la guerre, Anciaux, a été nommé général, le seul dans l’histoire du Corps.

En novembre 1919, en pleine mobilisation, il a été décidé à nouveau de transférer les dépôts et la section médicale d’Anvers à Bruges, et à Vilvorde, près de Bruxelles, une pharmacie a été créée au profit de l’armée en campagne. Après la Guerre la Pharmacie Centrale a été réinstallée et elle a obtenu la plus grande partie de ses stocks des nations alliées.

Du point de vue scientifique, nous notons la création du premier laboratoire de bactériologie par le pharmacien militaire Dulière. Pendant la Première Guerre Mondiale des pharmaciens militaires ont été actifs dans les analyses des gaz de combat allemands et ils ont développé le principe de protection contre eux.

Depuis lors, le domaine NBC (protection nucléaire, chimique et bactériologique) restera une activité constante des pharmaciens militaires, jusqu’à nos jours. Dans les années 45-50 divers pharmaciens militaires belges réputés ont été actifs dans des centres de recherche des gaz de combat en Belgique et à l’étranger.
Jusque dans les années 70, des chercheurs remarquables méritent d’être cités, tels que les pharmaciens Couvreur et Pochet. Actuellement une nouvelle relève s’annonce avec quelques confrères prometteurs. Pour finir, c’est grâce au Colonel Defalque, que la biologie clinique au sein des Forces Armées est, elle aussi devenue le fief des pharmaciens militaires.

 

Le passé et le futur

Dans les pays scandinaves, aux Pays-Bas et dans les pays anglo-saxons, le rôle des pharmaciens militaires est le plus souvent restreint à la pharmacie comme telle et à l’approvisionnement médical.

Mais, comme il est clairement montré dans cet aperçu, leur rôle a toujours été nettement plus étendu en Espagne, en France, dan s lesterritoires germanophones et en Belgique : le management de l’hygiène, la production pharmaceutique, le contrôle et la délivrance, la gestion du matériel médical, la problématique NBC, la biologie clinique, la bromatologie, l’analyse des eaux,…

La spécialisation est parfois contre-productive aux Forces Armées – les insectes sont super-spécialisés – le service médical et par conséquent le Corps pharmaceutique doit être polyvalent.

Les tâches classiques ont subi des modifications, bien entendu. L’opérabilité et la mobilité sont devenues des mots clefs, mais il y a aussi l’interoperabilité, la communalité, l’action rapide, la projetabilité aérienne …. Et bien sûr il y a la restructuration, l’outsourcing, les coupures budgétaires, la pharmaco-économie militaire. Et le management de crise : “Docteur, dites-moi ce dont vous avez besoin, et je vous dirai comment s’en passer”

Le pharmacien militaire a l’obligation de rester un homme d’expertises, au carrefour des sciences : la médecine, la chimie, la biologie

 

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